La sexualité et la maladie : briser le silence

Par : Anne Katz, Ph. D., inf. aut., FAAN

La sexualité englobe bien davantage que les rapports sexuels, même si c’est souvent la seule chose que ce mot évoque. Pour certains, sexualité rime avec intimité, mais en réalité, la sexualité n’est qu’une façon parmi d’autres de cultiver sa relation avec son conjoint ou un partenaire amoureux (c’est là le vrai sens de l’intimité). La sexualité englobe la perception que l’on a de soi-même comme homme ou comme femme, les personnes pour qui on a une attirance physique ou émotionnelle, les choses qui nous excitent (érotisme), les pensées et les fantasmes, et, bien sûr, les activités sexuelles auxquelles on s’adonne avec un ou une partenaire ou en solo. La sexualité est liée à l’image que l’on se fait de soi-même, et elle se transforme au fil des ans, à mesure qu’on vieillit et qu’on doit composer avec des maladies et des handicaps et, à terme, avec une situation de fin de vie.

Suis-je toujours un être sexué?

La maladie peut affecter la sexualité de bien des façons. Les effets secondaires des traitements associés à plusieurs maladies, dont le cancer, sont parfois cause de fatigue. Et la fatigue est souvent vue comme le premier obstacle à l’activité sexuelle. Certains symptômes associés à la maladie (douleur, etc.) peuvent aussi causer une baisse de libido. Mais d’autres facteurs parfois plus subtils affectent notre perception de nous-mêmes et, par ricochet, notre désir de se livrer à des actes sexuels avec un ou une partenaire ou en solo. C’est le cas lorsque, à la suite d’une chirurgie, une personne perd une partie de son corps qui définit sa féminité ou sa masculinité. Les femmes qui ont subi l’ablation d’un sein (mastectomie) à cause d’un cancer disent souvent qu’elles ne se sentent plus femmes; dans pareille situation, une femme a moins le goût de se présenter nue devant quelqu’un. Chez les hommes, la prise de médicaments pour combattre un cancer de la prostate de stade avancé s’accompagne parfois d’une baisse du désir sexuel. Dans pareille situation, un homme oubliera souvent d’exprimer physiquement son amour à la personne aimée : il cessera de la toucher, de l’embrasser ou même de la prendre par la main. Cette disparition des contacts physiques crée souvent deux solitudes. Le besoin de toucher et d’être touché est un besoin essentiel de l’humain, et une personne qui en est privée finira souvent par se sentir très seule.

Parlez-vous!

La communication est l’ingrédient clé de la sexualité. Parlez à votre partenaire de ce que vous ressentez, de votre perception de votre corps et de vos désirs en ce qui concerne le toucher. Demandez-lui comment vous pourriez répondre à ses besoins de contacts physiques et d’affection. La meilleure chose à faire, c’est de vous exprimer verbalement. La communication non verbale et le silence peuvent être source de malentendus et causer de la peine. La sexualité se transforme avec l’âge, le temps et la maladie; on n’éprouve pas nécessairement les mêmes sentiments vis-à-vis de son corps ou de celui de son partenaire qu’il y a 20 ans, 30 ans ou plus. Nos sentiments ne se dégradent pas pour autant, car en vieillissant, on en vient souvent à accepter les choses. Mais il faut néanmoins décrocher de notre vision d’antan et voir les choses comme elles sont maintenant et comme elles pourraient être.

Le rôle des prestataires de soins

Les prestataires de soins devraient s’enquérir des effets d’une maladie ou d’un traitement sur la sexualité d’un patient, mais ils s’en abstiendront souvent. Certains sont peu disposés à aborder un sujet jugé délicat et se disent que si c’est important pour le patient, c’est lui qui l’abordera. Mais c’est loin d’être idéal. Les patients attendent souvent de voir si leur prestataire de soins les questionnera sur un sujet, à défaut de quoi ils penseront que le sujet est sans importance. Le silence qui en résulte peut alors donner l’impression que la sexualité est un sujet tabou.

Certains prestataires de soins craignent d’être incapables de répondre à une question sur la sexualité parce que les écoles de sciences infirmières et de médecine ne s’étendent pas tellement sur le sujet. D’autres semblent être trop occupés pour parler de la charge émotionnelle qui accompagne la maladie. C’est bien dommage, parce que la sexualité est importante pour tout le monde : patients, partenaires et prestataires de soins. C’est une dimension importante de la qualité de vie depuis l’adolescence jusqu’au troisième âge, en situation de maladie et de la fin de vie, où le toucher et l’amour sont si importants.

Demandez une recommandation

Si vous voulez en parler, allez-y! Dites à votre prestataire de soins que vous voulez parler de ce qui se passe dans votre corps ou de votre relation avec votre partenaire ou de votre vie sexuelle. Demandez-lui de vous orienter vers un intervenant, un sexologue ou un travailleur social. Vous devrez peut-être faire quelques démarches pour trouver l’aide dont vous avez besoin, mais vous y arriverez.

Ressources

Katz, A. (2007). Breaking the Silence on Cancer and Sexuality: A Handbook for Health Care Professionals. Oncology Nursing Society: Pittsburgh, PA.

Katz. A. (2009). Sex when you’re Sick: Reclaiming Sexual Health after Illness or Injury. Greenwood: New York, NY

Katz, A. (2009). Woman Cancer Sex. Hygeia Media: Pittsburgh, PA.

Katz, A. (2009). Man Cancer Sex. Hygeia Media: Pittsburgh, PA.

Association of Sex Educators, Counselors and Therapists (www.AASECT.org)


Contenu révisé en mai 2019